« Les influenceurs alimentent un imaginaire de la surconsommation complètement dépassé » #428

21/06/2022

Le collectif Paye ton influence milite pour que les influenceurs fassent eux aussi leur transition écologique et qu’ils cessent de promouvoir des entreprises peu vertueuses à leurs millions d’abonnés. Mais Amélie Deloche, cofondatrice du collectif, sait qu’ils ne pourront pas révolutionner le secteur de l’influence qui pèse 14 milliards de dollars.

Les Echos START : Pour vous, quel est le problème avec les influenceurs ?

Amélie Deloche : Ils vantent des modes de vie et de consommation à rebours des contraintes climatiques et des limites planétaires. Ils sont suivis par des millions de personnes et édictent les normes sociales. Avec eux, ils entraînent toute une génération de jeunes dans cette direction. Il faut se rendre compte que chez certains, Léna Situations est plus connue que le président de la République. Les influenceurs sont devenus des sortes de modèles au pouvoir absolument énorme, et souvent bien plus que les célébrités classiques. Or, dans le combat climatique à mener, on a besoin de leur influence.

Est-ce que vous ne surestimez pas leur influence. Parmi les followers, peut-être certains les regardent uniquement pour se distraire sans jamais s’en inspirer, non ?

Bien sûr, ils n’exercent pas une influence énorme sur tous leurs abonnés. En revanche, ne perdons pas de vue qu’ils influencent tout un écosystème, notamment les marques qui aujourd’hui passent par les influenceurs pour vendre leurs produits. Donc en agissant sur eux, on touche l’ensemble des entreprises qui veulent faire parler de leurs produits.

Par ailleurs, j’attire l’attention sur le fait que ce type publicité n’est pas régulé, contrairement à celle en ligne ou à la télévision. On trouve des partenariats, souvent cachés, sur tout et n’importe quoi, comme de l’alcool par exemple sans aucun contrôle. Les réseaux sociaux sont devenus la vitrine paroxystique de la société de surconsommation. Toutes les trois stories Instagram, c’est un jeu concours ou un partenariat.

Qu’est-ce que concrètement vous demandez aux influenceurs ?

Qu’ils prennent leur responsabilité, qu’ils s’obligent à avoir des chartes éthiques quant à leurs partenariats.

Vous savez que tout leur modèle économique est fondé sur la publicité. Est-ce que les exigences éthiques en matière d’écologie sont compatibles avec leur activité ?

Le fait que leurs revenus proviennent de la publicité ne les dédouane pas de réfléchir aux types de partenariats qu’ils nouent. Typiquement promouvoir Shein et la fast fashion ou des allers-retours le temps d’un week-end à Dubaï ou à Coachella, c’est une folie pour l’environnement. Au collectif Paye ton influence, on aimerait qu’ils adoptent une charte dans laquelle ils disent qu’ils ne mettront plus en avant certaines entreprises qui ne sont pas compatibles avec les réalités climatiques.

Ceci étant dit, on sait qu’on ne va pas pouvoir révolutionner le secteur de l’influence, mais on voudrait au moins qu’ils aient une réflexion sur leur impact, qu’ils intègrent les enjeux écologiques pour qu’ils repensent leur manière de faire de l’influence.

➔ Lire l’interview complète sur les Echos Start