"Il y a des viviers de savoir-faire partout en France" : l'enjeu de la formation et de la transmission pour les marques de mode #304

05/01/2022

Des entreprises made in France, conscientes des méfaits de la délocalisation, ont choisi de ranimer l’industrie textile française en pérennisant des savoir-faire. Rencontres et explications avec les marques Le Slip Français, Broussaud, 1083 et B. Solfin.

Ancrées en France, des marques de mode ont opté pour le circuit court qui permet de redynamiser des territoires tout en revalorisant des savoir-faire textiles locaux. Mais pour les pérenniser, Le Slip Français, Broussaud, 1083 et B. Solfin ont dû former à leurs métiers, le plus souvent en interne car beaucoup de formations ont disparu. A chaque entreprise sa méthode, explications passionnantes des quatre dirigeants.

« Depuis 30 ans la filière textile française a beaucoup diminué. Dans les années 90, il y avait 460 000 emplois en France, aujourd’hui cela se stabilise autour de 60 000, donc 80 % des emplois textile sont partis et il reste 1/5e des ateliers. Mais les machines sont toujours là, le savoir-faire aussi. Il y a toujours un écosystème de gens qui ont le savoir-faire mais ils sont vieillissants. Il y a des viviers activables de savoir-faire partout en France » constate Guillaume Gibault, le fondateur de la marque Le Slip Français.

Le Slip Français : « un ancien patron d’usine a été notre formateur »

Fondée en 2011 par Guillaume Gibault, Le Slip Français travaille, entre autres, avec huit fabricants-partenaires certifiés Origine France Garantie et huit labellisés Entreprise du Patrimoine Vivant.

« Autant dans notre métier du sous-vêtement, il y a toujours des usines textiles avec des unités de production sur lesquelles on peut s’appuyer et accompagner notre croissance depuis 10 ans, sur certains produits comme le chausson, il n’y a plus personne ». Avec la Covid 19, la charentaise est devenue un accessoire de mode et face à la demande qui a excédé les capacités de production du Slip Français, la marque – qui collabore déjà avec les quatre derniers fabricants de chaussons français – a ouvert en octobre 2021 La Manufacture de pantoufles.

L’atelier fabrique 5 à 600 paires/semaine et prévoit 20 000 paires en 2022. Pour Guillaume Gibault, il est facile de trouver du matériel : « nous avons investi dans cinq machines anciennes avec la volonté de former des gens. Mais on a structuré le projet en s’associant avec un atelier de maroquinerie avec qui on travaillait déjà », la marque Léon Flam relancée en 2011 par Louis Epaulard et Guillaume Gibault (son arrière-petit-fils). Cette ligne de fabrication est intégrée à l’usine Léon Flam de Châtillon sur Indre, qui connaissait un formateur spécialisé dans la chaussure avec 40 ans de métier. « Cet ancien patron d’usine a été notre formateur. Il a travaillé avec nous sur toute la mise en place du projet pendant six mois. Là, il termine sa mission d’accompagnement et on devient autonome. Il nous a aidé dans l’achat des machines et dans la formation des ouvriers et des ouvrières (5 personnes) mais aussi dans toutes les opérations tout au long de la chaîne de production. Après, il continuera à nous suivre et interviendra ponctuellement ».

Broussaud : « on a mis en place un plan de formation en interne »

Avec la certification Origine France Garantie et le label Entreprise du Patrimoine Vivant, la manufacture Broussaud est une référence de la chaussette made in France. Située en Haute-Vienne, depuis trois générations, elle fabrique pour 150 marques et a lancé la sienne en 2020. Mais son dirigeant Aymeric Broussaud – qui a repris en 2006 l’entreprise de ses parents en liquidation – a des difficultés à embaucher par manque de formation au niveau national.

Pour lui, le constat est clair : « Il y avait déjà un retour au made in France et avec la Covid 19, il y a eu un phénomène d’accélération pour les Français qui ont les moyens, car le made in France coûte cher mais la chaussette est un produit qui reste accessible ». Mais pour répondre à la demande de chaussettes à motifs à trous, un produit qui surfe sur la tendance, il faut des machines. Le dirigeant éligible à France Relance (dispositif de l’Etat pour aider les industries) a présenté un dossier sur l’automatisation et l’investissement productif et « sur notre investissement de 1,4 millions d’euros, on a une aide de 30% ».

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