Recyclage textile: Carbios inaugure sa ligne de préparation à Clermont-Ferrand #796

03/10/2023

Le spécialiste français du biorecyclage des PET (polyéthylène téréphtalate) a inauguré ce 2 octobre à Clermont-Ferrand, dans le Puy-de-Dôme, son démonstrateur de préparation textile au recyclage biologique. Roland Lescure, ministre délégué à l’Industrie, a pris part à cette étape importante pour le groupe, qui attend sous peu le permis de construire pour son premier site de biorecyclage à échelle industrielle situé à Longlaville, en Meurthe-et-Moselle, à la frontière luxembourgeoise.

Ce dispositif de préparation vient compléter l’usine de démonstration installée à Clermont-Ferrand, totalement opérationnelle. “Il ne nous manquait qu’une étape, qui est la préparation des vêtements avant qu’ils entrent dans notre processus de polymérisation”, explique à FashionNetwork.com Emmanuel Ladent, directeur général de Carbios, qui a réuni autour du projet un consortium de marques et groupes comme Patagonia, Salomon, On Running, PVH (Tommy Hilfiger), Puma. “Leur grande demande est de faire du recyclage de fibre à fibre, pour que des vêtements puissent redevenir des vêtements”, précise le responsable, rappelant que la plupart des vêtements recyclés sont réalisés en « bottle fibers”, ces fibres issues de bouteilles recyclées.

Ce démonstrateur de préparation textile au recyclage découpe en morceaux (dit “chiquettes”) des vêtements conçus à au moins 90% en polyester, en enlevant les éléments durs et autres ajouts en métal. Les colorants et résidus non-PET seront ensuite filtrés, tandis qu’une cuve de 20.000 litres dédiée au processus de dépolymérisation va produire un PET de qualité d’origine.

“Notre procédé à trois avantages”, explique le dirigeant de Carbios. “Déjà, 90% de la matière est réutilisée, et la fibre qu’on en tire est recyclable dix fois. C’est par ailleurs un procédé biologique, n’utilisant pas de solvants chimiques. Et le processus est deux fois moins consommateur d’eau, et deux fois moins émetteur de CO2 que la production de PET vierge.”

Quatre cuves de 300.000 litres

Une solution que Carbios entend déployer à grande échelle à Longlaville, où la construction d’un site de recyclage devrait être lancée en fin d’année, pour une mise en service en 2025. Après le démonstrateur de 20.000 litres de Clermont-Ferrand, ce sont là-bas quatre cuves de 300.000 litres qui traiteront chaque année 50.000 tonnes de PET. L’équivalent de deux milliards de bouteilles, ou 300-400 millions tee-shirts en polyester, note Carbios.

Ce futur site n’a pas vocation à produire uniquement des fibres textiles mais aussi la production d’emballages et bouteilles recyclés pour des partenaires de Carbios tels que L’Oréal ou Pepsi Co. Mais pour pouvoir produire de “fibre à fibre”, se posera la question de l’approvisionnement en textiles. “A l’échelle de démonstration, nous n’avons pas besoin de beaucoup de tonnage, mais cela va changer quand nous serons à l’échelle industrielle”, pointe Emmanuel Ladent. Il évoque également la pression des ONG et de la Commission européenne quant aux exportations des gisements de textiles en fin de vie.

“La majorité des déchets textiles sont aujourd’hui malheureusement exportés vers l’Afrique, l’Amérique du Sud ou l’Asie”, déplore le dirigeant, pour qui les organismes de collecte savent que cette situation ne sera pas tenable dans la durée. “En attendant, nous, nous récupérons et recyclons des vêtements qui sont complètement impropres même à l’exportation. Ce sont des pièces dont personne ne veut et qui, sans nous, seraient promises à l’incinération.”.

Le développement de Carbios s’inscrit dans une accélération française et européenne des initiatives en termes de textiles recyclés. En janvier 2022, l’américain Eastman et le canadien Loop annonçaient des investissements massifs dans la vallée normande de la Seine. Pas de quoi inquiéter Carbios, devant l’immensité de la masse de matériaux à gérer. Un point qui permet pour l’heure de contourner le problème des mélanges de matières, dont la séparation est un frein au recyclage. “La question se posera, mais pour l’instant il faut déjà réussir à recycler tous les tissus textiles à disposition”, estime Emmanuel Ladent, qui confie que, au-delà du polyester, Carbios travaille sur de futurs procédés de recyclage des polyamides.

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