Une fois de plus, quoique de façon encore plus prononcée et assumée, les experts du Giec alertent sur l’urgence d’agir. Le deuxième volet du sixième rapport du Groupe intergouvernemental d’experts sur le changement climatique a été publié ce lundi 28 février. Il met l’accent sur les impacts du changement climatique et l’adaptation avec un message clé : « Si les températures dépassent les 2°C de réchauffement, le développement résilient au changement climatique deviendra impossible dans certaines régions du monde ».
« Les preuves scientifiques sont sans équivoque : le changement climatique est une menace pour le bien-être humain et la santé de la planète. Tout retard supplémentaire dans une action mondiale concertée sera une occasion manquée pour assurer un avenir vivable », a confirmé Hans-Otto Pörtner, le coprésident du Groupe de travail II du GIEC. « Ce rapport est un terrible avertissement sur les conséquences de l’inaction », a complété Hoesung Lee, le président du GIEC. « Nos actions d’aujourd’hui façonneront la façon dont les gens vont s’adapter et la nature réagir face à l’augmentation des risques climatiques. »
L’adaptation ne doit plus être une option
Le rapport souligne ainsi que plus les mesures d’adaptation sont mises en œuvre tôt et pour des niveaux de réchauffement global inférieurs à 1,5°C, plus le monde en bénéficiera. « En investissant dans l’adaptation maintenant, le monde évitera des investissements plus importants à l’avenir. De plus, l’adaptation peut générer de multiples avantages : assurer la productivité de la pêche, de l’agriculture et des entreprises, favoriser l’innovation, la santé et le bien-être, renforcer la sécurité alimentaire et les moyens de subsistance des populations, et reconstruire et renforcer la nature, tout en réduisant les risques et les dommages climatiques » notent les experts.
S’adapter signifie ajuster notre comportement (par exemple, où nous choisissons de vivre ; la façon dont nous planifions nos villes et nos implantations) et adapter nos infrastructures. Si au moins 170 pays et de nombreuses villes ont désormais inclus l’adaptation dans leurs politiques, les progrès sont inégaux et loin d’être suffisants, conclut le rapport. Parmi les obstacles à l’adaptation, il y a le faible sentiment d’urgence ressenti, le manque de volonté politique, le faible engagement des citoyens et du secteur privé, des ressources limitées ou même la désinformation dans le cas de l’Amérique du Nord. La pauvreté et les inégalités sont également deux limites d’adaptation importantes, entraînant des impacts inévitables pour les populations vulnérables.
Les pertes et dommages au centre des discussions
D’ores et déjà, de nombreuses espèces et écosystèmes sont proches ou au-delà de leurs limites d’adaptation, alerte le Giec. Par exemple, lorsque de petites îles deviennent inhabitables en raison de l’élévation du niveau de la mer et du manque d’eau douce, les habitants peuvent ne pas avoir d’autres options que d’abandonner leur maison. La disparition des coraux semble également inéluctable désormais, de même que la dégradation de l’Arctique entraînant la disparition d’écosystèmes et d’espèces. Or, si l’on ne peut plus s’adapter, l’étape suivante ce sont les pertes et dommages.
Le sujet cristallise depuis des années les négociations climatiques internationales car les États riches refusent de débloquer des fonds supplémentaires pour pallier aux effets du changement climatiques pour lesquels on ne peut plus s’adapter notamment dans les pays en développement. « Les négociations sur le climat de la COP27 en Égypte à la fin de l’année doivent enfin convenir d’une facilité de financement pour faire face aux pertes et aux dommages. Nous savons que dans les coulisses, les États-Unis ont tenté de supprimer les références aux « pertes et dommages » du texte du GIEC. C’est malhonnête et totalement honteux » a commenté Teresa Anderson, responsable de la justice climatique au sein d’ActionAid International.
Les 195 gouvernements membres du Giec se sont finalement accordés pour reconnaître que « le changement climatique induit par l’humain, y compris des événements extrêmes plus fréquents et plus intenses, a causé des impacts négatifs généralisés et des pertes et dommages connexes sur la nature et les personnes ». Un sacré premier pas.