Pourquoi la France devient le nouvel eldorado de l'économie circulaire #318

25/01/2022

L’économie circulaire est la star des investissements étrangers en France. Eastman, Ikea, Loop… ces géants vont engager des milliards dans l’Hexagone pour développer des projets d’économie circulaire dont « la plus grande usine de recyclage moléculaire de plastiques du monde ». Une opportunité pour la France de faire basculer les modèles industriels vers plus de durabilité, tout en réduisant sa dépendance aux matières premières.

L’Hexagone a été choisi par les investisseurs étrangers pour y déployer leurs activités d’économie circulaire. L’américain Eastman mobilise en effet 850 millions d’euros pour construire « la plus grande usine de recyclage moléculaire de plastiques du monde » afin de « développer l’économie circulaire ». L’objectif est de recycler 160 000 tonnes par an de déchets, y compris du textile. Quant au québécois Loop, il s’associe à Suez pour développer des projets de recyclage du plastique à hauteur de 250 millions d’euros. Ikea a de son côté fait part d’un investissement de plus de 650 millions d’euros pour des projets d’économie circulaire en France.

« Ces investissements sont une très bonne nouvelle, ils vont permettre à la France de passer d’élève moyen à bon élève », indique Eric Berger, chef de projet industrie au Shift Project. Le pays affiche aujourd’hui un taux de recyclage du plastique inférieur à 30% alors que la France veut devenir exemplaire dans ce domaine avec l’ambition de recycler 100% du plastique en 2025. Ces nouvelles capacités vont aussi réduire les exportations françaises de déchets plastiques, qui s’élevaient à 750 000 tonnes en 2020 selon l’Ademe, alors que de plus en plus de pays refusent de les traiter. Les pouvoirs publics déroulent donc le tapis rouge à ces projets d’économie circulaire : dans le cadre de Choose France, les aides publiques consenties sont comprises entre 5% et 10% du montant des investissements.

La demande des industriels explose

La demande des industriels français, tirée par les nouvelles réglementations, est forte. Avant même d’être sortie de terre, l’usine de Loop a déjà vendu son plastique recyclé à Danone, L’Oréal et L’Occitane qui visent 100% d’emballages d’origine recyclée ou bio-sourcée à horizon 2025 ou 2030. Même succès pour Eastman qui a reçu des lettres d’intentions de LVMH, Estée Lauder ou Procter & Gamble. « Les industriels veulent aussi améliorer leur bilan carbone et leur étiquetage environnemental, y compris sur le scope 3, ce qui passe par la prise en compte de l’impact de tous les matériaux utilisés », indique Sébastien Delpont, porte-parole de Greenflex, une société qui accompagne les entreprises dans leur transition écologique. Dans un contexte de pénuries, les matières recyclées locales permettent également de sécuriser les approvisionnements.

Résultat, la demande en matière recyclée est plus forte que l’offre et les cours du plastique recyclé augmentent. Il devient donc rentable de produire du plastique recyclé et l’économie circulaire se dote d’un modèle économique attractif. « Un changement de modèles industriels vers plus de circularité s’opère avec, à la clé, la création d’emplois non délocalisables », note ainsi Emmanuelle Ledoux, directrice générale de l’Institut National de l’Economie Circulaire (Inec). Ce déploiement est aussi facilité par l’existence « d’un écosystème installé en France avec la présence de champions, comme Veolia ou Suez, mais aussi d’entreprises innovantes », ajoute la spécialiste. Par exemple, le Français Carbios, qui a inventé le recyclage à l’infini des déchets plastiques grâce à un nouveau procédé biologique, est implanté à Clermont-Ferrand.

Toutefois, pour que l’économie circulaire prenne son envol, « la France doit encore améliorer la collecte qui reste un problème », souligne Alexis Lemeillet, expert en prévention et gestion des déchets. L’enjeu est de taille pour la France qui, avec le développement de telles filières, cherche à « retrouver une autonomie sur les matières premières, au même titre que l’État recherche une indépendance énergétique », indique Sébastien Delpont.

 

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