« Ce qui nous a surpris, ce sont les effets délétères qu’ont les fibres naturelles sur la digestion et l’immunité de l’huître », explique Camille Détrée, maître de conférence en biologie marine à l’Université de Caen-Normandie, citée dans un communiqué.
« La rugosité de la surface des fibres naturelles est plus importante et provoque vraisemblablement une inflammation plus forte des parois digestives au cours du transit », dit-elle.
L’industrie textile utilise en outre jusqu’à 8.000 composants chimiques différents pour améliorer les propriétés des vêtements, la teinture ou le traitement aux pesticides, questionnant la non-dangerosité supposée des fibres naturelles, selon les auteurs.
Chaque année, environ 2 millions de tonnes de microfibres, principalement d’origine naturelle, sont rejetées dans les océans, en grande partie par le biais des lave-linges domestiques, avant d’être ingérés par les organismes marins, rappelle cette étude menée par des scientifiques de l’Ifremer, de l’Université de Bretagne Occidentale, du CNRS et de l’Université du Mans.
Ces derniers ont exposé des huîtres creuses à des microfibres textiles naturelles (laine, coton biologique ou non) et synthétiques (acrylique, nylon et polyester) et à leurs additifs chimiques pendant 96 heures. Ils ont ensuite étudié la capacité d’huîtres à ingérer ces microfibres et comparé les effets sur leur santé.
Une première expérience a été réalisée avec une concentration de 10 microfibres par litre, considéré comme le taux moyen dans les océans, et un scénario « catastrophe » avec une concentration de 10.000 microfibres par litre.
« Nous n’avons pas observé plus d’effets sur les huîtres exposées à de fortes ou de faibles concentrations en microfibres. Cela suggère qu’une faible dose environnementale est suffisante pour déclencher des effets sur leur santé », précise Mme Détrée.
Selon Arnaud Huvet, biologiste marin à l’Ifremer et coauteur, l’étude montre que les microfibres d’origine naturelle « ne semblent pas moins impactantes que les synthétiques sur la santé des huîtres ». « Il est néanmoins important de tenir compte de leur durée de persistance dans l’environnement marin : de quelques semaines ou mois pour les fibres 100 pour cent naturelles, contre des dizaines voire centaines d’années pour les matériaux synthétiques ».
Plutôt que de promouvoir des fibres naturelles, les auteurs plaident pour l’adoption d’une mode lente (« slow fashion ») étendant la durée de vie des vêtements. (AFP)
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