Le Portugal interdit l’usage du terme « cuir végane », dénoncé comme étant « trompeur » #342

24/02/2022

Des professionnels du secteur dénoncent un moyen détourné d’enrayer l’essor des alternatives végétales au cuir animal.

Que ce soit dans une démarche écoresponsable ou pour défendre le bien-être animal, de plus en plus de start-up se penchent sur des alternatives végétales au cuir. Ces matières innovantes à base de champignons, d’ananas ou encore de pommes séduisent de plus en plus les consommateurs et consommatrices, en quête de substituts aux peaux animales. Mais pour les industriels du cuir, un détail ne passe pas : leur dénomination. Au Portugal, le gouvernement vient deQue ce soit dans une dredéfinir aux yeux de la loi ce qu’est le « cuir » et interdit désormais l’usage du terme « cuir végane » pour désigner ces alternatives. Une décision qui fait débat.

Au Portugal, un nouveau décret visant à encadrer l’usage commercial du terme « cuir » vient de trancher : les alternatives végétales au cuir ne sont pas du « cuir ». En vertu de la nouvelle législation, des expressions telles que « cuir végane », « cuir végétalien », « cuir synthétique » et « cuir d’ananas » sont désormais interdites. Le gouvernement portugais a estimé que ces termes étaient techniquement incorrects et trompeurs pour les consommateurs et consommatrices, comme le rapporte Vegconomist. Des amendes et des poursuites pénales pourront être engagées contre les industriels qui ont recours à ces appellations.

Une volonté détournée de protéger l’industrie du cuir ?

Mais si ce décret vise, a priori, à apporter plus de clarté dans les décisions d’achats, certains dénoncent d’autres ambitions. Plusieurs industriels spécialisés dans les alternatives végétales au cuir ont en effet pris la parole pour pointer du doigt ce qui, à leurs yeux, ressemble d’avantage à un moyen détourné d’enrayer la croissance de ce secteur émergent, au profit de l’industrie traditionnelle du cuir. C’est le cas d’Alicia Lai, fondatrice de l’entreprise Boheme B, spécialisée dans les chaussures véganes : « Nous avons tous déjà entendu les termes « saucisse végétalienne », « chocolat végétalien » et « cuir végétalien ». Ces termes ne visent pas à tromper les consommateurs, mais à montrer qu’il n’y a pas d’ingrédients d’origine animale dans le produit, et ils sont très bien acceptés », a-t-elle déclaré à Vegconomist. […]

De leur côté, les partisans du décret ont pointé du doigt la forte teneur en plastique de certaines alternatives au cuir, comme DESSERTO, un matériau à base de cactus ou encore le Piñatex, à base d’ananas. Ces deux substituts connaissent un succès exponentiel et sont largement utilisés dans les secteurs de la mode, du sport et de l’automobile, rappelle Vegconomist.

En France, le « cuir végane » n’existe pas aux yeux de la loi

En dehors du Portugal, des luttes similaires ont déjà été menées par les industriels de la viande et des produits laitiers en Australie, en Europe et aux États-Unis, pour interdire aux fabricants de produits véganes d’utiliser des terminologies traditionnelles de l’alimentation d’origine animale. Laure Ducos, chargée de campagne chez Greenpeace France a récemment dénoncé l’influence des lobbies français de la viande dans ces décisions : « Ces lobbies savent très bien que ces termes peuvent donner envie aux gens de consommer des produits d’origine végétale et c’est pour ça qu’ils se battent, pour limiter cette attractivité en plein essor », avait-elle déclaré, dans une interview pour VégéGood. En France, l’emploi du mot « cuir » est par ailleurs encadré par la législation et ne peut désigner qu’une peau animale. Le « cuir végane » n’existe donc pas aux yeux de la loi.