Dans un pantalon à paillettes gris argenté du créateur danois Stine Goya, j’étais assise au premier rang lors de la semaine de la mode de Copenhague, invitée en tant que seule députée européenne danoise à participer aux négociations sur la stratégie de l’UE en faveur des textiles durables. Le défilé portait sur la mode classique, mais il se passe aussi quelque chose d’autre dans l’industrie en ce moment, qui prend conscience que les politiciens européens risquent de faire beaucoup de bruit mais de formuler les mauvaises politiques si l’industrie et les législateurs ne communiquent pas davantage entre eux.
Seulement 1 % des vêtements produits sont recyclés, ce qui est tout simplement insuffisant. Mais contrairement à d’autres secteurs à forte empreinte carbone, tels que l’acier et le ciment, l’industrie textile est restée sous le radar en matière de durabilité et ne participe pas à la transition verte. Ses processus de lavage, de décapage et de teinture sont reconnus comme très nocifs pour l’environnement. Elle continue d’utiliser trop d’eau, trop de produits chimiques et des techniques trop gourmandes en énergie.
Dans le même temps, on ne comprend pas suffisamment comment assainir la fabrication et orienter l’industrie vers des tissus qui peuvent être recyclés tout au long de la chaîne d’approvisionnement, afin de parvenir à une véritable durabilité. Les connaissances dont nous disposons dans ce domaine pointent dans des directions différentes. Ce n’est pas suffisant. Il faut donner à l’industrie textile la direction à suivre et les moyens de faire le ménage.
L’Union européenne entend promouvoir le changement en définissant une stratégie pour un secteur textile durable en mars 2022. Les membres européens de l’industrie internationale de la mode sont désireux de s’y associer et, le mois dernier, la Semaine de la mode de Copenhague a présenté son programme de développement durable pour la période 2023-2025, s’engageant notamment à promouvoir le recyclage des vêtements et à décarboniser la chaîne d’approvisionnement.
À l’heure actuelle, environ 16 directives et règlements de l’UE sont liés d’une manière ou d’une autre au développement durable dans le secteur de la mode. Nous devons maintenant les actualiser pour qu’ils soient adaptés à l’avenir. En tant que conservateur, je préfère les carottes, mais je n’ai pas peur d’utiliser le bâton si nécessaire.
Je veux que la logique du cycle de vie l’emporte sur l’écoblanchiment et la promotion de technologies sélectionnées qui, en termes d’impact sur le climat et l’environnement, ne sont pas beaucoup plus performantes que leurs alternatives. Qu’il s’agisse de voitures ou de vêtements, je n’en peux plus des évangélistes verts autoproclamés qui affirment que leur solution est meilleure que les autres.
Le principe devrait être que le pollueur paie. Le marché intérieur du textile de l’UE doit non seulement être le plus durable au monde, mais aussi le plus attrayant pour les nombreux acteurs de l’industrie textile.
La Fast Fashion
Je ne veux pas intervenir directement dans la consommation quotidienne des gens, mais je veux faire en sorte qu’il soit plus facile de « joindre le geste à la parole ». La fast fashion est un problème parce qu’elle favorise la surproduction de textiles fabriqués à l’aide de méthodes dont l’empreinte carbone est très élevée et qui nuisent à l’environnement.
En outre, la mode rapide semble être guidée par des modèles commerciaux dans lesquels la contribution à la croissance socio-économique locale au stade de la production est discutable.
Nous disposons déjà des moyens nécessaires pour rendre le secteur textile de l’UE plus durable. Il suffit de les mettre à l’échelle et de les commercialiser. Nous devons utiliser le pouvoir du marché unique pour traiter les 27 méthodes nationales différentes de traitement des textiles usagés dans les États membres. Nous devons soutenir davantage la recherche et l’innovation dans tous les maillons de la chaîne qui constituent le parcours du berceau au berceau des textiles dans l’économie circulaire.
Les petits entrepreneurs sont souvent ceux qui ont les approches les plus innovantes. Ils doivent être stimulés et protégés contre l’étouffement par des règles inutiles et des exigences en matière de documentation.
Les grands acteurs doivent également être écoutés. Les règles et cadres nouveaux et plus ambitieux doivent soutenir leur compétitivité sur le marché international. Leur compétitivité – en tant qu’entreprises européennes fières de l’être – doit être stimulée afin d’orienter l’ensemble de l’industrie textile mondiale dans une direction durable.
Les réglementations doivent viser à faciliter les modèles d’entreprise durables et à améliorer la compétitivité du secteur. De nombreuses obligations augmentent les coûts pour les entreprises. Il est donc très important de fournir un financement et un soutien adéquats aux PME et aux microentreprises, afin que les réglementations ne surchargent pas les moteurs de l’innovation et des nouvelles technologies. Au contraire, nous devons saisir les opportunités commerciales qui découlent du recyclage, de la réutilisation et de la réparation.
La recherche et l’innovation sont essentielles pour renforcer la compétitivité. Nous devons investir dans des technologies qui réduisent l’empreinte carbone du secteur textile, créent plus d’emplois et améliorent la qualité de vie.
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