Les 3.500 usines de confection du Bangladesh représentent environ 85% de ses 55 milliards de dollars d’exportations annuelles, et fournissent de nombreuses grandes marques mondiales, comme Levi’s, Zara (groupe Inditex) et H&M.
Mais les conditions sont désastreuses pour bon nombre des quatre millions de personnes travaillant dans ce secteur, dont la grande majorité sont des femmes dont le salaire mensuel de départ est de 8.300 taka (75 dollars).
Les ouvriers de l’industrie textile de ce pays pauvre d’Asie du Sud manifestent depuis deux semaines, exigeant un quasi-triplement du salaire mensuel minimum du secteur.
Un comité nommé par l’Etat avait annoncé mardi l’augmentation des salaires des ouvriers du textile de 56,25%, à 12.500 takas (106 euros) par mois, une offre aussitôt balayée par les syndicats.
Les syndicats réclament un minimum de 23.000 takas (195 euros) par mois pour permettre aux ouvriers de faire face à une inflation galopante. Washington a exhorté mercredi les autorités à « revoir la décision sur le salaire minimum, afin de s’assurer qu’elles répondent aux pressions économiques croissantes auxquelles font face les ouvriers et leurs familles », a déclaré le porte-parole du département d’Etat, Matthew Miller.
Anjuara Khatun, opératrice de machine à coudre âgée de 23 ans et mère de deux enfants, a « reçu une balle dans la tête » mercredi et est décédée, a déclaré à l’AFP le mari de la victime, Mohammad Jamal. La police avait ouvert le feu sur des manifestants dans la ville industrielle de Gazipur, proche de la capitale Dacca.
Washington s’est dit « préoccupé de la répression en cours des ouvriers et des syndicalistes », appelant Dacca à « protéger le droit des travailleurs à manifester pacifiquement ».
La police a indiqué que de nouvelles violences avaient éclaté mercredi à Gazipur après une manifestation de près de 4.000 personnes qui protestaient contre l’offre d’augmentation jugée trop faible.
Des milliers d’autres ont bloqué une autoroute, où au moins cinq policiers ont été blessés, dont deux grièvement, a déclaré à l’AFP un policier sous couvert d’anonymat.
« Dos au mur »
Basée aux Pays-Bas, la Clean Clothes Campaign, un groupe de défense des droits des salariés du textile, a qualifié le nouveau salaire minimum proposé de « salaire de la pauvreté ».
« Le nouveau salaire minimum condamne les travailleurs à une lutte pour leur survie pendant les cinq prochaines années », a souligné le groupe dans un communiqué. De nombreuses marques s’approvisionnant en vêtements au Bangladesh ont depuis longtemps promis de garantir un salaire décent, mais « elles n’ont pas agi, illustrant (tout) le vide de leurs engagements ».
« Je suis veuve et mère de deux enfants. Je touche environ 13.000 taka, heures supplémentaires comprises. Comment puis-je survivre avec si peu de revenus? Je suis dos au mur », déclare Shahnaj Akter, une ouvrière dans le secteur du textile.
Ces manifestations salariales constituent un défi majeur pour la Première ministre Sheikh Hasina, qui dirige le pays d’une main de fer depuis 2009. L’opposition conteste son pouvoir alors qu’elle se prépare pour les élections prévues avant la fin janvier.
La sécurité a été renforcée dans les principales villes industrielles à l’extérieur de Dacca après la menace des syndicats d’organiser de nouvelles manifestations.
Environ 600 usines fabriquant des vêtements pour de nombreuses grandes marques occidentales avaient été fermées la semaine dernière et des dizaines d’entre elles ont été saccagées lors de la plus grande manifestation salariale depuis une décennie, selon la police.
Quatre usines ont également été incendiées et au moins deux ouvriers ont été tués dans les violences, des dizaines de milliers d’ouvriers bloquant les autoroutes et attaquant les usines. (AFP)
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