C’est le cinquième plus gros émetteur de gaz à effet de serre et le second en termes d’occupation des sols. Le secteur du textile est particulièrement montré du doigt par les associations ces dernières années. Face à la prise de conscience des consommateurs, les grands groupes de la fast fashion ont dû s’adapter. Toutes les enseignes – H&M, Zara, Mango, Uniqlo… – mettent en avant leurs engagements durables ces dernières années. Mais quelle est réellement la part de collections responsables dans leur rayon ? C’est la question à laquelle a répondu la startup d’analyses Retviews (Lectra). Et les chiffres parlent d’eux-mêmes.
Chez Zara, du groupe Inditex, la collection Join Life, unique collection responsable, représente seulement 14 % de son offre. Chez le géant suédois H&M, c’est pire. Sa collection Conscious plafonne à 10 % de son assortiment total. En bas du classement le japonais Uniqlo et l’espagnol Mango ne dépassent même pas les 2 %. Or, comme le note l’étude, H&M, Zara et Mango ont pourtant signé le Pacte de durabilité de l’industrie du G7 en s’engageant à ce que leurs actions soient compatibles avec une trajectoire de réchauffement à 1,5°C notamment. Plus surprenant, c’est l’enseigne néerlandaise C&A, qui n’a pourtant pas signé le pacte, qui s’engage le plus dans la mode durable. Plus d’un tiers de ses collections sont responsables.
Le flou de la mode responsable
Reste que, globalement, l’offre responsable reste marginale. Mais la pandémie pourrait bien changer la donne et accélérer cette mutation. « La crise du Covid-19 pourrait être considérée comme un catalyseur qui poussera l’industrie au changement », croit Katia Cahen, Marketing Intelligence Directeur chez Lectra. C’est aussi l’avis de Yohann Petit, directeur général de l’Alliance du commerce pour qui la crise sanitaire est « plus que jamais une opportunité de changement ». Retviews a ainsi remarqué « une croissance nette en termes de communication » autour du sujet de la mode responsable permettant aux consommateurs d’avoir « accès à plus d’information et de transparence ».
Mais attention au greenwashing, préviennent les experts, car aujourd’hui, aucune réglementation ne définit la mode responsable. Et ce flou permet de présenter une collection comme « responsable » tout en utilisant des matières qui ne le sont pas particulièrement, comme le coton, le polyester, l’élasthanne ou encore la viscose. « Bien qu’étant organiques ou recyclés, ces tissus nécessitent encore beaucoup de ressources naturelles comme l’eau ou finissent pas être nocifs pour nos océans », notent les auteurs de l’étude. D’autres matières comme le lin ou le chanvre ont un impact environnemental bien moins élevé.
Le Covid-19 a mis en lumière les défaillances du secteur
S’il veut renouer avec les consommateurs, le secteur textile va donc devoir être exigeant. La crise sanitaire a mis en lumière les défaillances majeures de cette industrie, allant des répercussions sur les ouvrières basées à l’autre bout du monde et sous-payées, jusqu’au modèle d’approvisionnement fondé sur des prix bas et des gros volumes. Un modèle économique qui commence à s’essouffler comme on l’a vu avec le redressement judiciaire de Camaïeu, la Halle ou encore André.
« Après le choc du Covid-19, le véritable défi de l’industrie de la mode sera la transformation de sa chaîne d’approvisionnement obsolète, affaiblie et destructrice de valeur », résume Katia Cahen. Preuve en est, le scandale des Ouïghours. Aujourd’hui, plus d’un vêtement en coton sur cinq dans le monde proviendrait de camps de travail dans lesquels les Ouïghours seraient internés. 180 ONG ont appelé les grandes marques à rompre les liens avec le Xinjiang, province où cette minorité est persécutée. H&M est la dernière grande enseigne en date à rompre avec son fournisseur chinois.